Partager, c’est déjà cautionner

Comment je propulse un simple message du statut d'inaperçu à celui de viral

Naindouba William

5/22/20252 min read

Le contenu de mon article

Le geste apparemment insignifiant du bouton « Partager » peut transformer un simple message d'un statut d'invisibilité en celui de phénomène viral, ayant des répercussions concrètes, parfois dévastatrices pour la cohésion sociale et l'harmonie.

Au Tchad, où des réseaux sociaux sont les sources d'information et de communication favorites d'un grand nombre de citoyens, surtout parmi la jeunesse, la dynamique du partage numérique revêt une signification spécifique. Quand un contenu est diffusé, la première réaction de ceux qui nous suivent, que ce soit dans nos communautés en ligne ou nos forums de discussion, n'est généralement pas de se concentrer sur notre objectif initial, ni même sur notre intervention personnelle. Ce qui attire l'attention, c'est le contenu brut : L'image percutante, le titre attirant, les mots tels que prononcés par l'auteur initial.

Sans l'intention de le faire, celui qui diffuse participe à la validation de ce message. Il lui procure un nouveau public, une plus grande exposition, et parfois même une sorte d’approbation tacite. Que cela concerne une désinformation susceptible de provoquer des tensions, un discours haineux visant une communauté spécifique, ou un contenu sensationnaliste jouant sur les craintes, la simple action de le diffuser contribue fréquemment à amplifer son impact et son expansion rapide.

Ce phénomène ne concerne pas uniquement le grand public. Au Tchad, certains individus se présentant comme des « spécialistes de la communication », des journalistes, des influenceurs ou des communicateurs parfois chevronnés, peuvent se laisser prendre au piège. À cause d'un manque de discernement face à la précipitation de l'information, par habitude dans un flot constant, ou parfois pour susciter du « buzz », ils contribuent à la propagation de contenus douteux, polarisants, voire nuisibles pour la stabilité. Cela entraîne une interrogation cruciale : si même ceux que l'on qualifie d'« experts » ne s'attachent pas constamment à vérifier, à croiser ou à étudier minutieusement ce qu'ils diffusent, comment pourrions-nous exiger du citoyen ordinaire, souvent moins équipé, une attitude réfléchie et informée ?

C'est exactement là où les programmes d'éducation aux médias et à l'information (EMI) au Tchad doivent obligatoirement étendre leur public et ajuster leurs approches. Il existe et faut saluer les initiatives, bien que la tenue d'ateliers privés pour des professionnels ou des membres de la société civile soit indispensable, cela reste insuffisant compte tenu de l'importance du défi. Ces initiatives, cruciales pour la formation d'un ensemble de compétences, demeurent fréquemment limitées à des groupes déjà conscients ou citadins.
Le moment est venu de mener une action majeure, d'initier des campagnes de sensibilisation à grande échelle et soutenues, ciblant spécifiquement le grand public du Tchad.

Le but est de réitérer les principes de base, clairement et efficacement : que ce soit au Tchad ou ailleurs, chaque contenu diffusé est un contenu amplifié, potentiellement approuvé par les autres, et donc susceptible de causer des préjudices s'il est incorrect ou mal intentionné. Il est crucial de développer l'habitude de la vérification, de remettre en question la source, d'identifier les motivations derrière une information et de comprendre les dynamiques de la viralité. Ces compétences essentielles doivent être largement diffusées pour transformer chaque citoyen tchadien en un acteur conscient et responsable dans le paysage informationnel. Le défi est considérable : il s'agit de protéger la communauté tchadienne contre les abus de la désinformation et d'améliorer sa capacité collective à résister aux manipulations.